“Filles-garçons, une même éducation ?”, supplément pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : Séverine Assous.

Filles-garçons : même éducation ?

Élève-t-on de la même manière une fille et un garçon ? Cette question touche toute la société, mais aussi nos comportements inconscients et nos automatismes… quand les stéréotypes sont souvent présents dès le berceau. Le magazine Pomme d’Api propose quelques pistes de réflexion dans son supplément pour les parents du mois de mars 2018.

Filles-garçons, une éducation ni rose ni bleue ?

“Filles-garçons, même éducation ?”, supplément pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : Séverine Assous.C’est le bol du petit déjeuner qui a fait office de déclic chez Lise, mère de deux garçons de 5 ans et 2 ans et demi. “Quand mon fils avait près de 4 ans, je me suis rendu compte que je ne lui avais jamais demandé de débarrasser son bol. Je suis persuadée que si j’avais eu une fille, je l’aurais exigé beaucoup plus tôt.” Lise est enseignante, et mène, au sein de son collège, un projet de sensibilisation des élèves au sexisme ordinaire. C’est dire si elle est vigilante !

Mais même si l’on a une pensée critique sur les stéréotypes, “nous nous comportons différemment avec les hommes et les femmes ; et ce, dès leur naissance”, explique Patricia Mercader, psychologue spécialisée dans les questions de genre. De nombreuses expériences l’ont prouvé. Parmi elles, la suivante : un même nourrisson est présenté à des adultes, une fois vêtu comme un garçon, une fois comme une fille. Selon le genre attribué au bébé, les descriptions qu’ils en font divergent : plus grand, plus lourd, plus actif, plus affirmé, dans le premier cas, plus petit, plus léger, plus gracieux, plus faible, dans le second.

“Filles-garçons, même éducation ?”, supplément pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : Séverine Assous.
De façon inconsciente et automatique, par toutes les interactions quotidiennes, les petits garçons sont encouragés à la virilité, et les petites filles à la féminité, dans leur façon de penser, de ressentir, de bouger, d’évoluer dans l’espace. “Dans mon entourage, s’indigne Lise, je constate qu’on est plus exigeant vis-à-vis d’une petite fille pour la politesse (“Dis bonjour”) et pour la propreté (“Tu vas te salir”), alors qu’on accepte que mes garçons traînent par terre ou refusent de dire bonjour. Filles ou garçons, ce sont avant tout des enfants !”

Angélique se souvient des réflexions qu’elle a essuyées quand elle a offert à son fils de 3 ans la cuisinière miniature avec laquelle il joue tant. Et puis aussi de tous ces clichés : “Les petits garçons, ça ne pleure pas, c’est courageux !” Autant de réflexes qui ménagent à chaque sexe une place différente. Des études ont montré, par exemple, que nous freinons la prise d’initiatives, l’action, le goût pour les sciences, chez les filles, et l’attention à autrui, l’expression des émotions, chez les garçons.

Une norme à découvrir

Dans les familles où le distingo fille/garçon ne se manifeste pas dans le choix des objets ou des vêtements, l’entrée à la maternelle marque souvent le moment où l’enfant se charge lui-même d’affirmer son appartenance à un sexe ou l’autre.

“Avec la petite section est arrivée la passion pour le rose, et les phrases du type «Ça, c’est un truc de garçon/de fille»”, s’étonne Mathilde, mère de deux enfants. “Normal, décrypte Patricia Mercader, à l’école, les enfants sont plongés dans la société telle qu’elle est et telle que l’interprètent des tout-petits, c’est-à-dire de façon rigide.” À cet âge-là, ils utilisent pour penser les catégories que leur propose l’environnement dans lequel ils grandissent. Plus ces catégories sont impératives (“Une fille, c’est comme ceci, un garçon se comporte comme cela”…), moins ils peuvent envisager des nuances ou des exceptions : un garçon aux cheveux longs ? Une fille déguisée en Dark Vador ? Pas possible ! La plupart se refuseront à eux-mêmes la liberté de s’emparer des attributs de l’autre genre. Voilà pourquoi le T-shirt violet, jusqu’alors apprécié, ne l’est plus : “Ça fait fille.” Sans compter que les attributs féminins sont moins valorisés que les attributs masculins. On accepte plus aisément qu’une fille se passionne pour le foot qu’un garçon mette des barrettes.

Transgresser la norme suppose de l’aplomb de la part de l’enfant, car cela suscite souvent remarques, moqueries, voire humiliations. Refuser radicalement tout stéréotype n’est d’ailleurs pas une bonne stratégie : rabrouer toute aspiration à la féminité chez une fille ou tout comportement viril chez un garçon serait tout aussi enfermant.

“Filles-garçons, même éducation ?”, supplément pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : Séverine Assous.

Elle est musclée, il est mignon

“Filles-garçons, même éducation ?”, supplément pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : Séverine Assous.“Je n’ai pas fait de commentaires quand mon fils a choisi une trousse avec des fleurs violettes pour sa rentrée en CP, se souvient Hélène. Et je le respecte aussi quand il est fier de me montrer ses muscles.”

“Je me suis rendu compte que je répétais à ma fille ‘Qu’est-ce que tu es mignonne !’ quel que soit ce qu’elle faisait, relate Sylvie. Je m’efforce maintenant d’être plus précise :  ‘Quelle force !’ ou ‘Comme tu es agile !’”

Angélique refuse de laisser penser à ses fils que les garçons ne connaissent ni la peur, ni la tristesse. “Ce qui importe, souligne Patricia Mercader, c’est de leur donner une marge de manœuvre. Si les pleurs d’un petit garçon sont toujours sanctionnés du cliché : “Un garçon, c’est courageux, ça ne pleure pas !”, si une petite fille casse-cou est traitée de “garçon manqué”,  ça ne les aide pas à bien se développer, car cela les force à s’adapter à une place dans le monde beaucoup trop étroite.”

Pour se construire comme garçons ou filles, les enfants ont besoin d’un cadre solide (il y a des garçons et des filles, ils ont des corps différents), mais suffisamment souple pour pouvoir exprimer leur individualité. Et pouvoir vivre leurs aspirations sans jugement : je suis une fille, je n’aime pas le rose, j’aime courir dehors et escalader les arbres. Je suis un garçon, j’aime jouer tranquillement et je déteste les ballons.

Élargir l’horizon des possibles

Telle petite fille voulait être “chevalière” ou “pompière”, tel petit garçon “maman” ou “maîtresse”. N’est-il pas dommage de couper court à ces rêves ? En 2014, un rapport du gouvernement soulignait que seuls 17 % des métiers sont mixtes. Pourquoi envisage-t-on si difficilement qu’un garçon puisse devenir enseignant en maternelle (ils ne sont que 7 %) ou qu’une femme devienne pompier professionnel ou mécanicien auto ?

Dur, dur, d’échapper à ces stéréotypes de partage des rôles dans la société. Et cela jusqu’au sein de la famille, comme le constate Sylvie : “Je suis assez féministe et mon compagnon prend largement sa part à la maison. J’avoue que je n’étais pas fière quand ma fille m’a fait remarquer que je me tournais toujours vers son père quand il fallait tondre le gazon ou sortir la visseuse !” À l’inverse, reconnaît Bertrand : “J’ai longtemps dit que “j’aidais” ma femme à la maison, comme s’il était évident que les tâches domestiques lui incombaient. Or, nous travaillons tous les deux…”
Alors, même si la majorité de ce que nous transmettons nous échappe, cela vaut le coup de réfléchir un instant aux modèles que nous proposons et aux discours que nous tenons : “Ce qui me semble fondamental, conclut Hélène, c’est que mes fils respectent les filles et ne se sentent pas supérieurs.” Et que les filles ne se sentent pas “inférieures” ou ayant moins de droits et de possibilités. Et qu’une fois adultes, les uns et les unes se retrouvent tous égaux devant – entre autres choses – le panier de linge sale et la machine à laver !

“Filles-garçons, même éducation ?”, supplément pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : Séverine Assous.

Garçons et filles : des cerveaux différents ?

“Filles-garçons, même éducation ?”, supplément pour les parents du magazine Pomme d’Api, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : Séverine Assous.Le cerveau humain ne présente pas de différences cognitives entre hommes et femmes. Intelligence, mémoire, raisonnement, attention…, garçons et filles ont les mêmes aptitudes. Si certains stéréotypes ont la vie dure, ce n’est pas parce que les cerveaux des garçons et des filles sont différents, mais parce qu’ils ont été différemment stimulés. À la naissance, 90 % des connexions neuronales ne sont pas faites. Le cerveau se façonne selon les expériences et les interactions. Les normes sociales, l’environnement, les expériences… vont forger les goûts et les aptitudes des individus. Aussi, si l’on entend parfois que les femmes ne sont pas faites pour les sciences, c’est justement parce qu’elles n’y sont pas toujours encouragées ou formées. Leur cerveau se focalise sur d’autres aptitudes et cela modifie alors sa structure.

Des albums ni roses ni bleus

Pour les enfants

  • “La princesse, le loup, le chevalier et le dragon”
    C’est l’histoire d’une princesse qui aime la bagarre. Et d’un chevalier qui aime aussi la bagarre. Ils se croisent, et rencontrent un loup et un dragon… Un petit album au ton très enlevé et très drôle, jusqu’au bout. Parce qu’on n’est jamais princesse ou chevalier jusqu’au bout des ongles ! À partir de 4 ans. Jean Leroy, Béatrice Rodriguez, Actes Sud junior, 12,80 €.
  • “Marre du rose”
    Une petite fille en a assez d’être enfermée dans les goûts qui ne sont pas les siens. À partir de 5 ans. Nathalie Hense, Ilya Green, Albin Michel Jeunesse, édition poche, 5,50 €.
  • “Nils, Barbie et le problème du pistolet”
    Nils rêve d’avoir une poupée Barbie, mais son père pense lui offrir un pistolet en plastique. Une inversion des clichés pas “moralo”, servie par des dialogues justes et drôles. À partir de 3 ans. Kari Tinnen, Mari Kanstad Johnsen, éditions Albin Michel Jeunesse, 14,50 €.

Pour les adultes

  • “Chère Ijeawele, ou un manifeste pour une éducation féministe”
    “Parce que tu es une fille” ne sera jamais une bonne raison pour quoi que ce soit. Jamais. En quinze “suggestions”, dans un style simple et plein d’humour, la romancière nigériane répond à une jeune mère qui lui demande “comment donner une éducation féministe” à sa fille. À lire par tous, hommes ou femmes, ne serait-ce que pour s’interroger sur l’éducation qu’on a soi-même reçue. Chimamanda Ngozi Adichie, Gallimard, 8,50 €.
“Filles-garçons, même éducation ?”, supplément pour les parents du magazine Pomme d’Api, n°625, mars 2018. Texte : Anne Bideault. Illustrations : Séverine Assous.

Couverture de Pomme d'Api et supplément pour les parents, mars 2018 : “Filles-garçons, même éducation ?” Texte : Anne Bideault. Illustrations : Séverine Assous.

Le SamThéâtre de SamSam et ses marionnettes à doigts

Fabrique tes SamThéâtres

Attention Mesdames et Messieurs, dans un instant, le spectacle va commencer !

Samsam.fr t’offre le SamThéâtre et des marionnettes à doigts. Tu pourras inventer des histoires cosmiques et jouer devant tes amis tes propres pièces de théâtre. (suite…)

Le numéro 4 de “Ma maison Montessori” est sorti !

Montessori à la maison ?

À l’occasion de la sortie du numéro 4 de Ma Maison Montessori, nous partageons une entrevue avec Charlotte Poussin, éducatrice Montessori et auteure, sur cette pédagogie de plus en plus populaire. 

(suite…)

“Dors, je le veux !”, supplément pour les parents, Pomme d'Api n°624, février 2018. Texte : Joséphine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

Sommeil des 3-6 ans : que faire quand dormir tourne au cauchemar ?

Moment très important pour les tout-petits, la sieste diminue, puis disparaît, entre 3 et 6 ans. Cette modification du rythme du sommeil perturbe, avec plus ou moins d’intensité, les nuits des enfants… et celles de leurs parents. Pour mieux comprendre ce qui se passe, et trouver une solution pour que petits et grands dorment suffisamment, Pomme d’Api fait le point avec deux médecins.

La fin de la sieste

Claire, maman de Jules entré en moyenne section, s’inquiète : avec la sieste qui diminue, son fils Jules va-t-il avoir son compte de sommeil ? Nadia, elle, se demande si, avec huit heures par nuit, Selim (6 ans) a suffisamment dormi. Quant à Julien, il craque légèrement : chaque soir, entre 20 heures et 22 heures, Lucie (4 ans) multiplie les allers-retours dans le salon au rythme de la même chanson : “J’ai pas sommeil !”

“Dors, je le veux !”, supplément pour les parents, Pomme d'Api n°624, février 2018. Texte : Joséphine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.Le sommeil de notre enfant, entre 3 et 6 ans, demeure toujours un enjeu. À juste titre : “Dès qu’il est diminué, le sommeil joue sur l’humeur, le comportement et l’apprentissage”, rappelle le docteur Marie-Josèphe Challamel, pédiatre spécialiste du sommeil, et auteure, avec Marie Thirion, de “Le sommeil, le rêve et l’enfant” (Albin Michel). Or, le passage 3-6 ans marque un cap majeur : c’est généralement le moment où la sieste tend à disparaître.

“Prenons le cas d’un enfant de 3 ans qui dort dix heures et fait deux heures de sieste, explique le docteur Rosa Jové, pédopsychiatre et auteure de “Dormir sans larmes” (Les Arènes). Une fois la sieste abandonnée, l’enfant dormira environ onze heures la nuit.”
La fin de la sieste peut provoquer temporairement l’enchaînement, la nuit, de deux cycles de sommeil lent, souligne également la spécialiste. Lesquels peuvent favoriser l’apparition de quelques troubles : terreurs nocturnes, énurésie, somnambulisme, qui disparaissent une fois l’étape franchie.

Mais on peut être rentré chez “les moyens” et avoir encore besoin d’une vraie sieste le week-end. Pour ce faire, il nous faut rester à l’écoute de nos petits : “Pour voir si le sommeil diurne s’impose encore, on peut observer notre enfant vers 17-18 heures. Si, à ce moment de la journée, on le sent agressif, capricieux ou particulièrement agité, alors c’est que la sieste est encore nécessaire”, estime Marie-Josèphe Challamel.

Patience…

La période 3-6 ans coïncide également avec la phase des premiers apprentissages et de la consolidation du langage parlé. L’enfant s’exprime mieux… et donc logiquement communique mieux sur ses angoisses, ses craintes, notamment au moment d’aller au lit. À nous alors de nous transformer en négociateur de l’ONU pour obtenir du petit qu’il aille se coucher, qu’il reste dans sa chambre… quand ce ne sont pas les deux à la fois.

“Dors, je le veux !”, supplément pour les parents, Pomme d'Api n°624, février 2018. Texte : Joséphine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.Certes, on peut trouver des solutions pour venir à bout de ces petits soucis (lire plus bas), mais pour Rosa Jové, il convient aussi que les parents cessent de se crisper sur la question du sommeil. Tout d’abord parce que, d’un enfant à l’autre, le besoin de dormir varie (entre huit et douze heures chez les 3-6 ans). C’est dire si les profils de dormeurs peuvent être variés ! “Comme les adultes, les enfants sont très différents”, résume Rosa Jové. Et la médecin de rappeler une évidence… que nous, parents, avons souvent tendance à oublier : le sommeil est un processus évolutif et, comme d’autres apprentissages, il s’acquiert au fil du temps. “On dit aux enfants : “Tu marches comme un(e) grand(e), maintenant.” En revanche, on ne leur dit jamais : “Maintenant, tu dors comme un(e) grand(e)”, s’étonne la médecin. Alors que c’est ce que nous devrions faire !”

Évidemment, il y a toujours autour de nous ces enfants parfaits qui ont fait leurs nuits à trois semaines, ne se relèvent jamais après avoir été couchés et dorment jusqu’à 9 heures le samedi matin. Des exemples qui pèsent un peu lourd sur nos épaules de parents fatigués par des nuits hachées ou des réveils en fanfare le matin. Et après ? D’abord, ces enfants ont-ils le sommeil aussi idyllique que leurs parents veulent bien le prétendre ? Ensuite, même si, pour l’heure, le temps semble un peu long, n’oublions pas que, petit à petit, les choses vont se mettre en place. Et, dans quelques années, viendra le jour où, après des années à l’avoir supplié d’y rester, c’est vous qui demanderez à votre enfant de sortir de son lit.

Petits soucis de sommeil : quelles solutions ?

  • Il ne veut pas dormir
    Tous les soirs, c’est la même histoire : Corentin, 5 ans, n’arrive pas à s’endormir. Bilan : c’est la java dans la chambre et le petit garçon dort rarement avant 22 heures.

Le point de vue de Marie-Josèphe Challamel, pédiatre spécialiste du sommeil : D’un jour à l’autre, il faut instaurer un rythme de coucher régulier. Mieux vaut donc éviter les couchers et levers tardifs le week-end. Ces deux jours où l’enfant est décalé suffisent à perturber le rythme en semaine. Pour revenir progressivement à une heure de coucher plus raisonnable, les parents peuvent la modifier tout doucement : 22 heures, puis, le week-end suivant 21h55, puis 21h50… et ainsi de suite. Il importe également d’associer la chambre au sommeil. Donc pas d’écrans, de jeux ou de pièce trop éclairée avant de se coucher.

“Dors, je le veux !”, supplément pour les parents, Pomme d'Api n°624, février 2018. Texte : Joséphine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

  • Il vient dans notre lit la nuit
    Inès, 6 ans, surgit souvent au milieu de la nuit pour s’installer entre ses parents dans leur grand lit. Faisant ainsi de leur chambre l’annexe de la sienne.

Le point de vue de la pédiatre : À mon sens, il faut être constant et ramener à chaque fois l’enfant dans son lit. Même si c’est fatigant pour le parent. On peut aussi motiver le petit en lui donnant un lot de 7 jetons en début de semaine : une incursion nocturne dans le lit des parents équivaut à rendre un jeton. Si, à la fin de la semaine, l’enfant a conservé tous ses jetons, on peut lui proposer quelque chose qui lui fait vraiment plaisir. Cette méthode fonctionne bien avec les 3-6 ans. Si, malgré tout, l’enfant continue à venir dans le lit parental, il faut peut-être creuser : y aurait-il de l’anxiété dans ce comportement ? Si oui, pourquoi ?“Dors, je le veux !”, supplément pour les parents, Pomme d'Api n°624, février 2018. Texte : Joséphine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

  • Il ne sait pas s’endormir seul
    Ava, 3 ans, connaît d’impressionnantes crises de larmes si son papa ou sa maman ne reste pas à ses côtés le temps qu’elle s’endorme. Et pas question de tenter de s’éclipser avant qu’elle ait fermé les yeux…

Le point de vue de la pédiatre : Il convient de ne pas passer trop vite sur le rituel du coucher. L’enfant a besoin de temps et d’habitudes pour envisager le moment du lit. Alors, les parents doivent au minimum prendre dix bonnes minutes pour lire une histoire, faire le câlin du soir. Et bien sûr, prévenir : “Je vais quitter la chambre avant que tu ne sois endormi.”

  • Il a des terreurs nocturnes
    Un cri dans la nuit : c’est celui qu’entendent régulièrement les parents de Solal, 3 ans. Le petit garçon a souvent des terreurs nocturnes.

Le point de vue de la pédiatre : Rappelons d’abord ce qu’est une terreur nocturne. Elle survient dans les trois premières heures, au cours de la phase de sommeil lent-profond. L’enfant hurle, les yeux grands ouverts. Souvent, il transpire. Cela arrive chez 15 % des petits environ. Inutile de le réveiller, mieux vaut le recoucher tranquillement. Souvent, ces terreurs nocturnes témoignent d’irrégularités dans les rythmes, ou d’un manque de sommeil. On peut donc veiller à ce que son enfant ait bien son compte de sommeil.

Parents épuisés… Comment récupérer ?

Pas facile de tenir le coup au travail quand les nuits sont fractionnées et qu’on court après le sommeil depuis des mois… “Le problème, estime Rosa Jové, ce ne sont pas les enfants, mais les horaires en entreprises qui ne sont pas adaptés. Il faudrait de nouvelles lois qui répondent à ces besoins.” En les attendant, comment faire ?

Une sieste de vingt minutes en début d’après-midi peut permettre de récupérer. De plus en plus d’entreprises proposent des espaces dédiés au repos. On peut aussi alterner la gestion des problèmes nocturnes avec son conjoint et ainsi s’offrir une nuit complète une fois sur deux.“Dors, je le veux !”, supplément pour les parents, Pomme d'Api n°624, février 2018. Texte : Joséphine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

Enfin, dans la mesure du possible, on peut confier son petit aux parents ou aux beaux-parents et s’échapper pour un week-end. Cela permet de récupérer, et cela fait aussi beaucoup de bien au couple parfois fragilisé par la fatigue accumulée.

Pour aller plus loin

  • “Dormir sans larmes”, Rosa Jové, Les Arènes.
  • “Le sommeil, le rêve et l’enfant”, Marie-Josèphe Challamel et Marie Thirion, Albin Michel.
  • Chaque mercredi, La Croix publie un supplément Parents & enfants, un espace dédié à l’actualité de la famille et aux questions d’éducation. Vous trouverez un grand dossier “spécial sommeil” dans les éditions (papier et numérique) du mercredi 24 janvier.
“Dors, je le veux !”, supplément pour les parents, Pomme d’Api n°624, février 2018. Texte : Joséphine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

“Dors, je le veux !”, supplément pour les parents, Pomme d'Api n°624, février 2018. Texte : Joséphine Lebard, illustrations : Jean-Louis Cornalba.

“Ces écrans trop attirants”, supplément pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.

Trop de temps devant les écrans : que risquent les jeunes enfants ?

Tablette, smartphone, DVD, télé… occupent les jeunes enfants, parfois des heures, sans jamais les lasser. Pour les professionnels de la petite enfance interrogés par le magazine Pomme d’Api, cette surexposition aux écrans nuit au développement des plus jeunes ! Explications, témoignages et conseils pour un bon usage en famille…

Ces écrans trop attirants

“Ces écrans trop attirants”, supplément pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.Il est 19 heures, on rentre tout juste de la garderie, de chez la nounou, du travail, et c’est le rush : un repas à préparer, des enfants épuisés à laver, à mettre en pyjama… La tablette, le smartphone, le DVD, la télé ont ce pouvoir magique de les occuper en nous laissant les coudées franches. Comme il est tentant d’y recourir ! D’autant que ces écrans ne semblent jamais les lasser. Si on leur donne le choix entre un puzzle en carton et un puzzle tactile, entre des Playmobil et un dessin animé, entre la pâte à sel et un petit jeu vidéo, il y a fort à parier que l’écran l’emportera. Normal, décryptent les neuroscientifiques, notre cerveau adore ce qui est facile et ne demande pas ou peu d’efforts.

Pour autant, la plupart d’entre nous ont l’intuition qu’il ne faut pas abuser de ces écrans si attractifs. D’ailleurs, il ne nous viendrait pas à l’esprit de dire : “Les Lego, c’est vingt minutes, puis on arrête.” Que risquent donc de jeunes enfants à passer trop de temps devant les écrans ?

Les signaux d’alerte

Le tableau dépeint par les professionnels est sombre. Florence Lerouge est orthophoniste depuis 1993. Ces dernières années, un phénomène l’inquiète : “Plus le temps passe, plus je reçois des enfants qui ne seraient pas arrivés chez moi s’ils avaient vécu ce qu’ils ont à vivre : jouer, patouiller, crapahuter… La vie d’un jeune enfant, quoi !”

À 3 ou 4 ans, quand des enfants passent plusieurs heures quotidiennes cumulées en compagnie d’un écran, ils ne parlent pas ou très peu (quelques mots, parfois en anglais, sans construction de phrases), ne regardent pas quand on leur parle, sont physiquement passifs. Pour résumer son impression, elle utilise une expression glaçante : “ Ils sont en panne”.

Certes, les enfants qu’elle reçoit dans son cabinet représentent des cas extrêmes, mais ils l’ont amenée à fonder, avec deux collègues, l’association “Joue, pense, parle” (lire ci-dessous) pour prévenir les troubles du langage et du raisonnement, par le jeu. Elle a également cosigné, avec d’autres professionnels de la santé et de la petite enfance, une tribune parue dans Le Monde en mai 2017, sous le titre : “La surexposition des jeunes enfants aux écrans est un enjeu majeur de santé publique”. Ces signataires entendent faire pression sur les autorités publiques pour que les effets nocifs des écrans soient mentionnés dans le carnet de santé. “Ces écrans trop attirants”, supplément pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.

Rappelons-le : pour que son cerveau se développe, pour se préparer aux apprentissages scolaires, un jeune enfant doit explorer le monde avec tout son corps : bouger, goûter, tripoter, sentir le froid, le chaud, l’air, mesurer sa force physique, tester son équilibre… Une palette extraordinaire que ne remplace pas la plus “éducative” des applis, sur la plus high-tech des tablettes. Le temps que les jeunes enfants passent devant ces appareils leur prend celui qui devrait être consacré aux activités indispensables à leur développement cérébral et physique. Pour en convaincre les parents dubitatifs, Florence Lerouge les invite à observer leur enfant jouer sur un écran. Qu’est-ce qui bouge ? Les yeux, ainsi qu’un ou deux doigts, sur un seul plan et quelques centimètres. À mettre dans la balance face aux potentialités infinies de mouvements du corps humain !

Pour entrer dans le langage et dans la pensée, l’enfant doit aussi avoir des interactions avec son entourage. Même si une appli “parle”, elle ne remplace pas la richesse des échanges humains.

Se déconnecter en famille

Heureusement, il est toujours temps d’aider les enfants à décrocher des écrans. Bien sûr, quand les enfants y ont été fortement habitués, ôter les écrans ne va pas de soi et nécessite un “réengagement des parents”, explique Anne Lefebvre, psychologue clinicienne et présidente d’Alerte (Association pour l’éducation à la réduction du temps d’écran). Se réengager, c’est-à-dire : “S’installer sur le tapis avec eux, les accompagner dans le jardin ou au parc, apprendre à faire des choses ensemble, comme les tâches ménagères ou la cuisine… Dire “va jouer avec ta sœur” ne suffit pas !”

C’est aussi, explique Florence Lerouge, ménager du temps et un espace à l’enfant pour le jeu, le laisser transformer, triturer, construire… sans exiger que tout soit rangé le soir. Il faut aussi résister à la tentation de tout faire à leur place. En les habillant, en les chaussant, en les servant à table etc., on ne les laisse pas développer leur attention, leur concentration, leur habileté.

Et les parents alors ?

Enfin, prenons aussi le temps de réfléchir à notre propre usage des écrans. Anne Lefebvre dénonce aussi “l’indisponibilité parentale” : qui n’a pas interrompu une partie de dominos à cause d’un SMS reçu ? Qui n’a pas détourné le regard devant la magnifique galipette de sa fille, en raison d’une alerte sur son écran ? Un parent dont les yeux sont rivés sur le smartphone peut ne pas percevoir les signaux de son jeune enfant. Cela entraîne chez ce dernier un sentiment d’insécurité, et ne fait que rendre l’écran plus désirable.

La famille a besoin de temps de déconnexion, conclut la psychologue. Il faut retrouver des temps communs dans notre vie contemporaine.” Alors, on fait quoi ce soir ? “Ces écrans trop attirants”, supplément pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.

Du bon usage des écrans

Dans le meilleur des mondes possibles, le mieux serait de :
› Proscrire tout écran avant 3 ans, même la télévision.
“Ces écrans trop attirants”, supplément pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.› Respecter la règle des “4 PAS” :
– PAS d’écran le matin,
– PAS d’écran dans la chambre de l’enfant,
– PAS d’écran pendant les repas,
– PAS d’écran avant de se coucher.

› Ne pas dépasser trente minutes par jour, jusqu’à 6 ans, en additionnant tous les écrans (DVD, smartphone, tablette, TV, ordinateur), et de préférence en s’asseyant avec eux.

D’autres conseils à retrouver sur :

Le témoignage d’Alice, 38 ans : “Je pensais bien faire…”

“Dès ses 18 mois, j’ai mis une tablette dans les mains de notre fils. Je pensais bien faire, pour qu’il apprenne les couleurs, l’alphabet, les comptines… Or, quand il est entré en petite section, il ne communiquait pas avec les autres, il ne s’est pas adapté. J’observais les autres enfants : de vrais moulins à paroles pour certains ! Et le mien, ne parlant pas, toujours dans sa poussette, sans vouloir marcher. J’en ai pleuré, je me suis dit : “J’ai loupé un truc !”

La maîtresse m’a conseillé l’orthophonie. Lors de la première séance, j’ai rempli un questionnaire sur notre vie quotidienne. Je me suis rendu compte que mon fils passait deux à trois heures par jour devant la tablette. Selon l’orthophoniste, c’était ça le problème. Je ne voulais pas y croire. Elle nous a invités à diminuer son temps d’écran en faisant d’autres choses avec lui à la place. Au début, ça a été horrible, il pleurait beaucoup pour avoir la tablette. C’était vraiment une addiction. On n’y est pas allés trop brutalement, mais on a regagné une forme d’autorité, en lui proposant d’autres choses. On s’est mis à jouer avec lui, à parler ensemble, à faire du vélo, des sorties. Il avait également une séance d’orthophonie hebdomadaire.

En quelques semaines, il s’est “dépouponné” et il a fait de gros progrès. “Il s’est transformé, a dit la maîtresse, il est curieux de tout, il parle, il nous fait rire.” C’est sûr, se passer des écrans transforme la vie de famille. Récemment, nous sommes allés à l’aquarium. Les enfants étaient émerveillés. Je me suis dit : “C’est ça la vie, en fait ! C’est simple !” J’avais voulu trop les gâter en achetant ordinateur, tablette, des choses inutiles à leur âge. Sa petite sœur, qui n’a jamais été devant une tablette, n’arrête pas de parler !” “Ces écrans trop attirants”, supplément pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.

Et chez vous, ça se passe comment ?

• “On est ferme, mais c’est pas évident… Ça n’évite pas toujours les crises !”
• “Avant le dîner, avec la fatigue, ce sont des hurlements quand le DVD s’arrête !”
• “Quand la tablette est tombée en panne, nous ne l’avons pas remplacée. Depuis, l’ambiance est beaucoup plus sereine le soir !”

Vos astuces de parents

“Ces écrans trop attirants”, supplément pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.• “J’utilise le replay : à la fin du programme choisi par mon fils, “ça s’arrête”. Je trouve ça plus facile à gérer que de mettre une chaîne.”
• “Je les avertis un peu avant, histoire de ne pas les “surprendre” quand j’éteins.” • “Nous avons confectionné des “tickets de cinéma”. Ma fille de 4 ans en a quatre par semaine, pour vingt minutes de DVD. Quand elle les a tous utilisés, elle doit attendre la semaine suivante.”
• “J’utilise un minuteur. Quand ça sonne, on éteint.”
• “Je préviens toujours : cet épisode-là, c’est le dernier.”

“Ces écrans trop attirants”, supplément pour les parents, Pomme d'api, n°623. Texte d'Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.

“Ces écrans trop attirants”, supplément pour les parents, Pomme d’api, n° 623. Texte d’Anne Bideault, illustrations de Mirjana Farkas.
“Montessori pour les nuls - Petit traité de pédagogie”, supplément pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : Joséphine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.

Montessori : petit traité de pédagogie avec Pomme d’Api

L’esprit de Maria Montessori souffle sur Pomme d’Api depuis sa création, il y a plus de 50 ans. Le supplément pour les parents du numéro d’octobre lui consacre son dossier et fait le point sur la “méthode Montessori”… dont on parle beaucoup sans toujours savoir précisément en quoi elle consiste !

Montessoqui ? Montessoquoi ? Montessori !

Comment le nom d’une Italienne, médecin et pédagogue, disparue au début des années 1950, se retrouve-t-il sur les lèvres de nombreux parents du XXIe siècle ? Car Maria Montessori et sa fameuse méthode semblent présentes partout : des écoles qui portent son nom aux tables des librairies qui regorgent d’ouvrages, en passant par les rayons des magasins qui proposent son matériel… Impossible, quand on est jeune parent, d’échapper au phénomène. “Montessori pour les nuls - Petit traité de pédagogie”, supplément pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : Joséphine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.

“Depuis une dizaine d’années, dans l’esprit de beaucoup de parents, Maria Montessori apparaît comme une promesse de mieux”, estime notre collaboratrice Anne Bideault, également rédactrice en chef de L’enfant et la vie”, journal fondé en 1969 pour faire connaître la pensée Montessori en France. Mais cette promesse demeure souvent floue. “Par la force des choses, à la télévision, dans les journaux, je vois passer beaucoup de contenus sur Montessori, reconnaît Alix, maman de Marceau, 3 ans, et Camille, 1 an. Mais de là à définir clairement de quoi il retourne… Pour moi, il s’agit de permettre à son enfant de développer son autonomie, non ?”

Alix a tout bon. En effet, l’engouement suscité par Montessori a parfois un peu dévoyé son propos. “Certains en parlent aujourd’hui en termes de performance, regrette Anne Bideault. Savoir lire à 5 ans, compter à 4 ans et demi… Alors que Maria Montessori parle épanouissement personnel, capacité de l’enfant à devenir lui-même, avec, comme grand projet sous-tendu, l’idée d’éduquer à la paix et au vivre-ensemble.” Pour ce faire, Maria Montessori part d’un constat de son époque : l’enfant est opprimé par un adulte plus fort que lui, qui dispose de lui et le contraint à s’adapter à son environnement. Une soumission, déplore-t-elle, “qui conduit à la négation de (sa) personnalité”.

Il va donc s’agir de tout révolutionner à la maison pour lui rendre toute sa place d’être humain à part entière. “Montessori considère que l’enfant nous montre, à nous éducateurs, ce dont il a besoin”, résume Charlotte Poussin, éducatrice Montessori, traductrice de son œuvre et membre du conseil d’administration de l’Association Montessori de France (AMF). “À nous d’élaborer un cadre adapté, structurant, dans lequel l’enfant sera le plus libre possible.”“Montessori pour les nuls - Petit traité de pédagogie”, supplément pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : Joséphine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.
Bien entendu, il n’est pas question – comme le souligne avec malice Charlotte Poussin – “de regarder tranquillement son enfant découper les rideaux du salon”. Mais de favoriser un intérieur où le petit pourra agir au maximum en autonomie (lire ci-dessous : “Vous faites du Montessori sans le savoir !”), en l’impliquant dans la vie quotidienne du foyer pour qu’il apprenne en faisant. Un environnement chaleureux, mais pas aseptisé, à l’instar des “Maisons des enfants” fondées par la pédiatre : le verre en vrai verre, les meubles qui font du bruit quand on les déplace… affinent sa maîtrise des mouvements et constituent autant d’expériences fondatrices.

Quant à nous, adultes, mieux vaut être dans une logique de proposition plutôt que dans une logique d’imposition. Ce qui ne représente pas la moindre des difficultés : “Nous avons tendance à être trop interventionnistes avec nos enfants, note Anne Bideault. Avec Montessori, il nous faut apprendre à nous tenir en retrait, à accepter de perdre du temps pour laisser notre petit faire les choses à son rythme.” À nous de trouver notre “seuil d’intervention”, comme le nomme Maria Montessori : “L’adulte doit dire et faire ce qui est nécessaire pour permettre à l’enfant d’agir seul utilement.”
Plus qu’une pédagogie uniquement tournée vers l’enfant, la méthode Montessori implique de vrais bouleversements dans les fonctionnements parentaux. C’est aussi ce qui la rend si passionnante : si le petit s’enrichit en faisant par lui-même, l’adulte gagne à lui concevoir ce cadre bienveillant. “Nous avons tous tendance à nous endormir sur les choses, écrit Maria Montessori, et il nous faut un être nouveau qui nous réveille et nous garde éveillés […], un être qui agit différemment de nous et qui chaque matin nous dit : “Regarde, il y a une autre vie, vis mieux!” Alors, prêts à vous lancer ?

Vous faites du Montessori sans le savoir !

Même si vous ne vous êtes pas plongé dans les ouvrages écrits par Maria Montessori, vous avez déjà fait du Montessori. La preuve par 10 (gestes et attitudes).

Le jour où vous avez proposé à votre enfant un petit marchepied pour lui permettre d’atteindre sans difficultés l’évier de la cuisine ou le lavabo.
Le jour où vous avez installé une patère à sa hauteur pour qu’il puisse accrocher lui-même son manteau.
Le jour où vous avez décidé d’arrêter de ponctuer vos phrases de “Vite, vite !” et autres “Dépêche-toi !” agacés, conscient qu’il faut laisser votre enfant agir à son rythme.
Le jour où vous avez installé dans sa chambre des espaces de rangement à sa hauteur : penderie basse, étagère basse
et petit casier pour ses chaussures et ses chaussons.
Le jour où vous avez installé un lit bas dans sa chambre : une façon de lui permettre d’aller se reposer quand il est fatigué, et de gagner en autonomie le matin ou à la fin de sa sieste.
Le jour où vous lui avez confié la tâche de couper un légume avec un vrai petit couteau, sous votre surveillance, au moment de préparer le repas.
Le jour où vous avez décidé de remplacer le gobelet en plastique par un vrai verre, lors de ses repas.
Le jour où vous lui avez donné un tablier, un petit balai, un joli chiffon coloré pour lui confier de menues tâches ménagères.
Le jour où vous avez opté pour une garde-robe – vêtements comme chaussures – facile à mettre afin de permettre à votre enfant de s’habiller de façon autonome.
Le jour où vous l’avez incité à faire un choix – entre deux desserts par exemple – pour éduquer sa capacité à choisir.

Jeux Montessori… comment choisir ?

En matière de matériel Montessori, l’offre est pléthorique. De Nature et Découvertes à Oxybul, les grandes enseignes se sont engouffrées dans la brèche pour proposer des jeux. D’accord, c’est tentant, mais comment faire le tri ? D’autant que le nom “Montessori” peut être utilisé par qui le souhaite, car il n’y a ni label, ni marque déposée
Plusieurs critères peuvent permettre d’opérer une sélection.

Le jeu doit traiter d’une seule chose à la fois.
Des cubes de tailles variées qui représenteraient chacun une partie de puzzle, ou des lettres rugueuses ornées de flèches mobilisent trop de facultés différentes pour l’enfant, censé se concentrer sur une tâche.
L’esthétique importe aussi car, comme le souligne elle-même Maria Montessori dans ses écrits, “la beauté invite à l’activité”.
Le parent, avant d’offrir le jeu, doit l’avoir manipulé auparavant, afin d’en maîtriser le fonctionnement et d’en proposer une démonstration. Mieux vaut s’être entraîné avant, surtout si l’activité est complexe, et vérifier que le jeu est fourni avec un livret explicatif !
Enfin, ne surtout pas oublier qu’on “présente” le jeu à l’enfant, on ne le lui impose pas. À lui de décider du bon moment pour s’en emparer. À nous de le laisser faire sans nous montrer trop interventionnistes.

“Montessori pour les nuls - Petit traité de pédagogie”, supplément pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : Joséphine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.

Petite biblio Montessori

Voici une sélection de livres pour se plonger dans l’univers Montessori.

L’enfant dans la famille, Maria Montessori, Éditions Desclée de Brouwer, 17,90 €.
Une très bonne porte d’entrée dans l’univers de Maria Montessori. Dans ce recueil thématique – “De ma méthode en général”, “L’environnement de l’enfant” – elle explique de façon limpide les grands principes de sa pensée.“Montessori pour les nuls - Petit traité de pédagogie”, supplément pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : Joséphine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.
L’enfant est l’avenir de l’homme, Maria Montessori, Éditions Desclée de Brouwer, 19,90 €.
Cet ouvrage inédit présente une série de cours que Maria Montessori a donnés en 1946. Un propos clair et visionnaire sur l’enfant et l’éducation.
Apprends-moi à faire seul – La pédagogie Montessori expliquée aux parents, Charlotte Poussin, Éditions Eyrolles, 16,90 €.
Fine connaisseuse de l’œuvre de Maria Montessori qu’elle a notamment traduite, Charlotte Poussin propose un ouvrage qui se concentre sur les 3-6 ans, à l’école comme à la maison.

Quelques citations…

“Il nous faut apprendre à nous maîtriser, nous tenir à l’écart, suivre l’enfant presque à distance, sans le fatiguer avec notre intervention, mais sans pour autant jamais l’abandonner.”
“Il faut permettre à l’enfant de participer à notre vie.”
“L’adulte qui n’a pas encore considéré l’activité de la main enfantine comme un besoin vital […] empêche l’enfant de travailler […]. La main permet à l’intelligence de se manifester.” Maria Montessori

“Montessori pour les nuls – Petit traité de pédagogie”, supplément pour les parents, Pomme d’Api, octobre 2017. Texte : Joséphine Lebard. Illustrations : Zelda Zonk.