Avec l’abonnement Pomme d’Api profitez d’un rendez-vous complice avec votre enfant !
Dans chaque numéro du magazine il retrouve : de magnifiques histoires pour la lecture du soir (également disponible en podcast), ses héros Petit Ours Brun, SamSam et Adélidélo et des réponses simples à ses “pourquoi-comment”.
Pomme d’Api c’est également des surprises tous les mois : des jeux rigolos pour manipuler et s’émerveiller et un cahier spécialement pour vous les parents.
Avec le magazine Pomme d’Api, c’est bon d’être un enfant !
Passage en classe supérieure votre abonnement dès 5,90€ par mois
Pourquoi mon enfant aime-t-il les livres imagiers ?
Ils ne racontent pas d’histoire, mais les tout-petits adorent ces livres pleins d’images accompagnées seulement de quelques mots ! Pourquoi cet intérêt ? Qu’apportent-ils aux jeunes enfants… qui demandent sans cesse qu’on les lise et relise avec eux ?
Margaud Liseuse répond sur la chaîne YouTube de Pomme d’Api…
15 mots pour comprendre les besoins de votre enfant
De A comme “Autonomie” à T comme “Temps”, en passant par “Limites”, “Pleurs” ou “Sommeil”, Pomme d’Api vous offre un petit guide pour comprendre les besoins spécifiques de votre enfant et l’accompagner avec confiance. “Confiance”, ce mot n’apparaît pas car il est partout… C’est la clé de voûte du développement de l’enfant.
Trois questions à Serge Bloch, le créateur de SamSam
À l’occasion de la sortie du film “SamSam”, au cinéma le 5 février, la rédaction de Pomme d’Api a interviewé le dessinateur Serge Bloch, “papa” du plus petit des grands héros.
La confiance en soi n’est pas innée. Comment aider son enfant à acquérir cet atout qui lui sera précieux tout au long de sa vie ? La rédaction du magazine Ma Maison Montessori a interrogé Charlotte Poussin, éducatrice et auteure de la nouvelle collection “Mes amis Montessori” (éditions Bayard jeunesse).
Qu’est-ce que la confiance en soi chez un enfant ?
C’est d’abord avoir confiance en la vie, faire confiance aux autres et faire confiance à son environnement. Lorsqu’il n’est pas inhibé dans ses élans, l’enfant développe son plein potentiel, il est capable de prendre des initiatives. Et, quand il se trompe, ce n’est pas un problème !
La confiance en soi est donc liée à l’estime de soi : l’enfant s’aime assez pour essayer, échouer, puis essayer encore. Il n’y a pas de raison de s’inquiéter si, parfois, l’enfant n’ose pas se lancer. C’est plus préoccupant s’il a une réaction disproportionnée quand il échoue… Ou s’il a tellement peur de rater qu’il n’essaie plus ou choisit toujours la solution de facilité.
Il ne faut pas confondre estime de soi et narcissisme : quand un enfant a confiance en lui, ça ne veut pas dire qu’il se sent meilleur que les autres, mais simplement qu’il s’accepte tel qu’il est et qu’il est capable de se dire : “Je peux réussir sans écraser l’autre, je ne suis pas en compétition avec lui. Je peux réussir et l’autre aussi.”
En quoi la pédagogie Montessori peut-elle aider un enfant à gagner en confiance ?
L’éducation, c’est une aide à la vie ! Maria Montessori soulignait l’importance des premières années de l’enfance. La période entre 0 et 3 ans est déterminante, car elle conditionne la confiance que l’enfant va avoir en lui et envers les autres. Dans le ventre de sa mère, ses besoins sont comblés, mais à sa naissance, il n’y a plus de tampon entre lui et le monde. Aider l’enfant à préserver sa sécurité intérieure et le “coffre aux trésors” qu’il a en lui – la confiance, la curiosité, le plaisir d’apprendre –, c’est tout l’enjeu de cette approche.
La pédagogie Montessori fait en sorte que l’environnement de l’enfant soit toujours adapté, du mobilier aux activités, pour qu’il puisse développer son potentiel. Les moments où il est concentré sont également essentiels ! Si l’enfant est plongé dans une activité, l’éducateur ne l’interrompt jamais, ni avec une remarque négative, ni avec une remarque positive, car ces interventions nuisent à sa concentration et créent chez l’enfant un besoin de reconnaissance. En complimentant l’enfant, on le détourne de sa motivation endogène : soit il considère alors que ce qu’il fait est acquis, soit il est tenté de faire une activité uniquement pour être félicité.
Quels conseils donneriez-vous aux parents ?
Laissons les enfants vivre avec nous ! Et ça ne passe pas uniquement par la case “jeu”. Il faut savoir que dès l’âge de 18 mois, l’enfant éprouve l’envie de “faire comme” et “faire avec” l’adulte. Par exemple, avec des objets adaptés à sa taille et à son âge, il peut apprendre à couper des aliments, faire couler son bain, ranger, nettoyer… Ça demande du temps, mais ça vaut le coup !
Comme le disait Maria Montessori, “toute aide inutile est une entrave au développement”. Donc si votre enfant se lance dans une activité, évitez les petites phrases du type : “tu es trop petit”, “tu vas te couper”, “tu t’es trompé”, “laisse-moi faire”. Laissez-le prendre des risques mesurés. Et lorsqu’il est concentré, ne l’interrompez pas.
Enfin, il faut se méfier des compliments. Privilégiez plutôt l’autoévaluation. Au lieu de lui dire “Tu as été le meilleur !”, optez pour la question “Qu’est-ce que tu as pensé de ton match ?” Prendre le temps de les impliquer, c’est une marque de profond respect et un cadeau de patience que nous leur faisons !
Comment raconter à votre enfant l’histoire de sa naissance ?
Arrivée d’un frère ou d’une sœur, questions sur la “fabrication” des bébés, ou envie d’en savoir plus, tout simplement… : les petits sont souvent curieux de l’histoire de leur naissance. La rédaction du magazine Pomme d’Api a interrogé des spécialistes pour vous accompagner dans le récit de ce moment si précieux du roman familial.
“C’était une nuit de grand vent. Par la fenêtre de la salle d’accouchement, on regardait les branches se balancer en attendant ta venue.” Cette histoire, Juliette et Thibault, les parents de Simon, 5 ans, la débutent toujours de la même façon. À chaque fois, le petit garçon l’écoute avec ravissement. Et pour cause : cette histoire, c’est celle de sa naissance. “Il nous demande très régulièrement de lui dire comment cela s’est passé. On feuillette les albums de photos, on ressort le faire-part”, raconte Juliette. Au-delà de la seule évocation d’un souvenir, relater à un petit l’histoire de sa naissance est essentiel. C’est en effet souvent entre 3 et 6 ans qu’un enfant commence à s’interroger sur la façon dont on fait les bébés. Et donc aussi sur sa venue au monde… Tout un programme ! “L’enfant est avide de ce récit car il a besoin de vérifier qu’il est né et qu’il est aimable”, résume Sylvie Prager-Séchaud, psychopraticienne et auteure de Les mémoires de naissance (éditions Dangles).
L’inscrire dans l’histoire familiale
L’enfant a besoin de “vérifier qu’il est né”, car raconter sa naissance à son enfant, c’est le mettre en contact avec des souvenirs que – consciemment du moins – il n’a pas. Mais c’est aussi l’inscrire dans l’histoire familiale. “La naissance, c’est le moment où on donne un nom, rappelle Myriam Ott, psychologue clinicienne. C’est le début du sentiment d’appartenance à une lignée, avec toutes ces personnes qui sont venues lui rendre visite : les grands-parents, les oncles, les tantes, les amis…”
Ilyès, 4 ans, adore regarder les photos où, nourrisson, il passe de bras en bras dans les premières semaines de sa vie. “Une bonne occasion de lui rappeler qui est qui dans la famille”, raconte Inès, sa maman. “Cela permet d’éclairer la lignée et les racines, estime Sylvie Prager-Séchaud. Cela enveloppe l’enfant, comme un berceau autour de lui.”
Enfin, l’enfant a besoin de “vérifier qu’il est aimable”, car raconter sa naissance, plusieurs fois, à sa demande, n’est rien d’autre qu’une preuve d’amour qu’on donne à son petit… notamment quand il a besoin d’être rassuré à ce sujet. “Cela rejaillit à plusieurs moments de la vie, confirme Myriam Ott. Par exemple, quand un petit frère ou une petite sœur s’annonce. Le fait qu’il ait lui-même été bébé échappe à l’aîné. Dans cette demande de récit, il y a le besoin de se sentir important, aimé.” Pour la psychologue clinicienne Brigitte Borsoni, coauteure de Des femmes, des bébés… et des psys (Érès), “raconter à l’aîné qu’on a aussi pris soin de lui quand il est né permet de faire baisser le niveau de rivalité qui peut se profiler à l’arrivée du deuxième enfant”.
Raconter… ce qui le concerne
Raconter la naissance, d’accord, mais raconter quoi ? “L’essentiel est de parler vrai, estime Brigitte Borsoni. Il n’est pas nécessaire de faire un faux récit parfaitement idyllique. Mais il n’est pas indispensable – si les choses ne se sont pas très bien passées – de dramatiser. L’enfant a besoin de savoir ce qui le concerne et seulement cela. Il a besoin de connaître des choses qui vont l’aider à grandir.” Pour Myriam Ott, l’important est de raconter “la rencontre, les premiers regards, le choix du prénom, combien il pesait… Autant de choses qui donnent de la valeur au moment”. Si l’accouchement a été un moment compliqué (lire plus bas “Que dire quand cela s’est moins bien passé ?”), rien n’interdit de prendre le temps, et de dire à l’enfant : “Je vais réfléchir et nous en reparlerons bientôt, c’est promis.”
“Et toi ?”
Dans ce récit, il convient de laisser une place à l’enfant. “On ne va pas tout dire en une fois, tempère Brigitte Borsoni. Il faut laisser la porte ouverte aux questionnements.” Et, pour Sylvie Prager-Séchaud, il est important de rendre l’enfant acteur de sa naissance. La psychopraticienne propose ainsi de lui demander : “Et toi, qu’est-ce que tu en penses ? D’après toi, c’était comment ?” Évidemment, le petit ne livrera pas un récit circonstancié de sa venue au monde. Mais émergeront peut-être alors des ressentis, des émotions… qu’on pourra revisiter ensemble. Aude a ainsi demandé à ses jumelles comment elles étaient dans son ventre, juste avant qu’elle accouche. L’une des deux a répondu : “Oh nous, c’était bien : on jouait aux cartes et on mangeait des bonbons !”
Comment raconter sa naissance à un enfant adopté ?
Dr Pierre Lévy-Soussan, pédopsychiatre, médecin directeur de la Consultation Filiation-Consultation Médico-Psychologique (Cofi-CMP) à Paris, auteur de Destins de l’adoption (Fayard) : « Raconter sa naissance à un enfant adopté, c’est avant tout lui raconter comment la famille est devenue “famille”, grâce à lui. Lui parler de sa naissance psychique. Il s’agit par là d’évoquer le désir qu’on avait d’un petit, puis la lettre ou le courrier annonçant son arrivée prochaine et enfin la rencontre. Ensuite seulement, les parents peuvent établir le maillage avec la “première” naissance. À ce stade, ce qui intéresse l’enfant, ce n’est pas tant l’informatif que le narratif. Il faut que les parents trouvent les mots par rapport aux origines de l’enfant. Le sujet n’est pas tabou, l’abandon a toujours existé. Il faut dire qu’il existe des parents qui ne veulent pas être parents alors que – et ça tombe bien – d’autres veulent l’être et ne le peuvent pas. Pour raconter cette naissance originelle, il faut avant tout avoir installé le récit autour de la naissance psychique. Ainsi, l’enfant sera suffisamment solide pour faire face à l’histoire de sa “première” naissance. »
Que dire quand cela s’est moins bien passé ?
L’accouchement a été compliqué Un travail douloureux et interminable, une césarienne en catastrophe, la peur qui prend le pas sur tout le reste… L’accouchement n’a pas toujours la couleur rose bonbon qu’on aimerait qu’il ait… Pour Myriam Ott, “les choses peuvent être dites à partir du moment où nous avons nous-mêmes fait le deuil de la naissance idéale”. Mieux vaut donc avoir digéré l’épisode, se faire aider si on sent que le traumatisme est toujours vivace. Puis insister sur les dimensions positives. Brigitte Borsoni propose d’évoquer la présence de personnes secourables (le personnel médical, le père…), au cours de cet épisode compliqué : “Savoir qu’on peut s’appuyer sur d’autres dans les moments plus difficiles de la vie, c’est important.”
Il est arrivé trop tôt… Un bébé prématuré, c’est aussi un bouleversement. Pour Brigitte Borsoni, “il ne faut pas raconter l’angoisse. Mais on peut dire la séparation, les allers-retours à la clinique. Dire qu’il y a eu des difficultés pour le bébé comme pour les parents, mais qu’on a fait avec”. Et pourquoi ne pas lire le joli Il n’est jamais trop tôt pour dire je t’aime, d’Angela Portella (Larousse) qui traite ce sujet avec délicatesse ?
On a eu des difficultés à assumer notre rôle de parents Pour certains parents, le coup de foudre avec l’enfant est immédiat. Pour d’autres, la rencontre prend plus de temps. Pour certaines mères (de 10 à 20 % environ), une dépression post-partum peut survenir. D’où un sentiment de culpabilité quand il s’agit de raconter la naissance et les premiers mois, moins idylliques qu’on ne l’aurait voulu. Pour Brigitte Borsoni, “l’enfant doit être sécurisé, il est donc essentiel de rappeler que ce n’est ni de sa faute, ni de celle de ses parents”. Pour Myriam Ott, on peut s’appuyer sur la notion d’apprivoisement : “Au début, cela n’a pas été très facile. Un bébé, ça pleure beaucoup et on ne savait pas toujours bien te comprendre. Alors on a cherché ensemble. Et petit à petit, on a appris à se connaître.” Et la psychologue de conclure : “Il faut aussi rappeler que la vie ne s’arrête pas à cet épisode.”
Un décès est survenu en même temps que la naissance Il arrive que la vie et la mort se télescopent au-dessus du berceau. Le décès d’un grand-parent survient dans les semaines entourant la naissance. Dès lors, comment raconter une naissance où la joie et la tristesse ont cohabité ? “Les sentiments ne font pas peur à l’enfant, estime Myriam Ott. C’est l’angoisse qui l’effraie. On peut donc expliquer à un petit que, parfois, des sentiments contradictoires surviennent.” Mais il convient de conserver au petit sa place d’enfant. Lui dire : “Je vais bien grâce à toi” ou “Tu as été la seule chose qui m’a fait tenir à ce moment-là” met un poids colossal sur ses épaules. “Mais s’il nous a aidés à nous tourner vers la vie, on peut l’exprimer, estime Brigitte Borsoni. Il faut surtout insister sur le fait que, si nous avons été tristes, ce n’était pas à cause de lui. Et revisiter les beaux moments de cette rencontre parents-enfant.”
«Leur naissance, une histoire “pour de vrai”», Pomme d’Api n° 640, juin 2019. Texte : Joséphine Lebard. Illustrations : Kei Lam.
Les chiffres sont sans appel : un couple sur trois se sépare, et la moitié de ces couples ont au moins un enfant à charge. Chaque année, près de 200 000 enfants sont confrontés à la séparation de leurs parents. Mais cette fréquence ne doit pas faire oublier que, pour un enfant, la séparation de ses parents est un bouleversement complet.
“Pourquoi je suis là ?”
La séparation des parents ? C’est un “tsunami”, un “monde qui s’écroule”… Pour nous faire comprendre ce qui se passe dans le corps et le cœur d’un enfant lorsque ses parents annoncent leur séparation, les professionnels n’y vont pas par quatre chemins. Timidement, comme pour nous convaincre que c’est moins terrible qu’ils ne le disent, on insiste encore : “Même si ses parents se disputaient souvent ?”, “Même si ça se passe sans heurts ?”. Oui. Même si.
Autant ne pas se voiler la face : quand ses parents se séparent, quelle que soit la situation et même si la vie à la maison était un enfer, l’enfant vit quelque chose de très difficile. Pourquoi ? Parce que l’enfant n’est plus à même, soudainement, de répondre à la question “Pourquoi je suis là ?”, explique Véronique Herlant, psychologue à Lyon. La rencontre – quelles qu’en soient les conditions – entre ses parents, dont il est le fruit, et qui justifie sa présence, a perdu son sens. Pour retrouver sa place, pour reprendre pied, “il va falloir que l’enfant remaille ce trou qui s’est ouvert, remette du sens.” Et ça, ça prend du temps.
“Est-ce que c’est pour toujours ?”
La profondeur de la blessure est telle que l’enfant tente de la colmater en nourrissant l’espoir que ses parents se remettent ensemble. Même un enfant qui affirme : “J’ai bien compris que c’est pour toujours” cultive cette croyance. Certains adultes témoignent d’ailleurs à quel point ils ont vécu longtemps avec cette idée.
De même, l’enfant a inévitablement la conviction que tout cela, c’est de sa faute. “L’enfant a besoin de se sentir coupable, expliquent les auteures de Une semaine chez Papa, une semaine chez Maman, Claire Wiewauters et Monique Van Eyken. Il est confronté à une décision à laquelle il ne peut rien changer et dans laquelle sa voix ne compte pas.” Se dire que c’est de sa faute, complète Véronique Herlant, c’est “reprendre prise, être acteur de ce qui arrive, reprendre place dans la scène qui se joue. Cela vaut mieux que de se sentir écarté”.
Il incombe aux parents de dire que leur décision est “une affaire de grands”. Sans craindre de se répéter, comme le souligne Raphaël, un papa séparé : “Il a fallu répéter à notre fille les éléments sécurisants, lui redire l’amour que l’on a pour elle, et qu’elle ne perdra ni l’un ni l’autre de ses parents.” Il est important de bien distinguer la relation parent-enfant de celle qui unissait les deux adultes.
L’entourage proche, les grands-parents peuvent aussi jouer un rôle important, pour que l’enfant ne se sente pas seul face à l’énigme de la séparation de ses parents. Si le cadre familial se trouve bouleversé, la maison des grands-parents peut offrir un havre de paix à l’enfant, dans la mesure où ceux-ci s’abstiennent de prendre part au conflit.
Être attentif aux réactions de son enfant
Ce qu’éprouve l’enfant ne se voit pas toujours. Si certains enfants réagissent très fort à l’annonce de la séparation de leurs parents (physiquement et verbalement), d’autres ne manifestent pas leur réaction de façon explicite. “Elle n’a pas réagi, relatent les parents, interloqués. On s’est même demandé si elle avait entendu.” C’est “comme si de rien n’était”… du moins en surface. Mais le corps a d’autres langages.
Véronique Herlant reçoit souvent des enfants en consultation pour “des symptômes” : cauchemars fréquents, retour du pipi au lit, difficulté de se séparer au moment d’entrer dans la classe ou d’aller chez la nounou… Ces troubles peuvent être des échos de la relation entre les parents. L’enfant peut également réagir avec un décalage dans le temps. Coralie en témoigne : deux ans après la séparation de ses parents, sa fille s’est mise à faire des reproches très durs à sa mère.
Un enfant a déjà vécu des séparations
“J’ai halluciné sur la capacité d’adaptation de ma fille ! Je l’ai trouvée super forte dans cette épreuve”, confie Raphaël, admiratif, sans pour autant s’aveugler sur les “moments de chagrin intense qu’elle traverse”.
Dans sa vie, un enfant a déjà vécu des séparations. En tout premier, sa naissance, qui l’a arraché au cocon douillet du sein maternel, puis les premières séparations de la vie quotidienne : aller chez la nounou, à l’école, partir chez les grands-parents… L’enfant sait quelque chose de la douleur, du refus de se séparer. “Tout ce matériau va lui être utile, explique Véronique Herlant, en venant résonner avec ce qu’il a à vivre. On aimerait tous de l’harmonie, mais on fait l’expérience que la réalité est faite d’inadéquation, et qu’il faut en permanence s’adapter. L’enfant est dans ce travail depuis sa naissance.”
Se comporter en adulte
Bien sûr, une séparation conflictuelle est plus difficile à vivre qu’une séparation où chaque parent maintient un lien constructif avec l’autre. Pour s’y efforcer, Claire Wiewauters et Monique Van Eyken suggèrent aux parents d’adopter la perspective de l’enfant, pour essayer de voir la situation “à travers ses yeux”.
Parmi les parents qui ont témoigné de leurs séparations, deux sont professionnellement confrontés à des déchirements conjugaux. L’un travaille dans la police, l’autre intervient auprès de familles, à la demande du juge aux affaires familiales. Et cela a joué dans leur façon d’aborder leur cas personnel : “Je suis flic, et je peux vous dire que j’en vois, des enfants qui morflent. Et dans tous les milieux. J’ai voulu éviter ça à ma fille à tout prix.” Comment ? En se comportant en adulte.
“Se comporter en adulte, détaille Véronique Herlant, c’est par exemple prendre assez de hauteur pour ne pas interpréter comme un rejet de sa personne les manifestations de colère, de tristesse, de dépression ou de rejet que peut éprouver l’enfant.” Ainsi, face à un enfant qui déclare : “Je ne veux plus te voir”, c’est à l’adulte de ne pas répondre sur le même niveau, en évitant de répliquer, en colère : “Moi non plus, je ne veux plus te voir” ou “Tu vas voir, je vais t’y obliger.” Autre cas classique : l’enfant, qui a bien identifié les idéaux éducatifs de l’un et de l’autre, souligne volontiers : “Chez Papa, on mange tout le temps des pizzas” ou “Chez Maman, je peux regarder la télé comme je veux”. Mieux vaut ne pas s’engouffrer dans des reproches indignés mais couper court en disant plutôt, comme Raphaël : “Ah, ben c’est cool, la semaine prochaine, tu pourras le faire alors !” Et expliquer sans craindre de se répéter qu’il y a des règles différentes chez Papa et Maman.
Finalement, tout cela participe d’une même attitude, que résume bien Chloé, qui a su conserver une bonne relation avec son ex : “Je me dis : on s’est trouvé de l’intérêt au point d’avoir un enfant ensemble. Il faut garder ça en mémoire.” Et ainsi, respecter et faire confiance à son ex-partenaire. “Même si c’est difficile, même si tout se mélange dans notre tête, conseille Pauline, il faut se forcer à distinguer l’ex-amoureux et le parent de notre enfant.” Cette épreuve peut aussi être l’occasion de démarrer ou d’approfondir un travail sur soi qui nous aidera, nous et nos enfants.
Témoignages de parents
Clémence “Je me suis séparée du papa de mon fils lorsque ce dernier avait 3 ans. Aujourd’hui, il en a 7. Nous le lui avons annoncé ensemble, nous avions beaucoup réfléchi et notre souhait principal, c’était de le déculpabiliser. Je ne sais pas ce qu’il a compris de cette conversation. Il n’a pas pleuré, ni montré d’émotion particulière. Nous sommes tous deux enfants de parents divorcés, et ça nous a donné une sensibilité particulière à ce qu’il pouvait ressentir et aux questions qu’il pouvait se poser. De manière générale, nous avons une bonne relation parentale. D’ailleurs, il nous arrive parfois de déjeuner tous les trois.”
Coralie “Ma fille avait 2 ans lorsque nous nous sommes séparés. Elle avait eu le temps de ressentir la mésentente entre nous. À l’époque, elle n’a pas eu de réaction particulière. Aujourd’hui, elle a 5 ans, et elle me renvoie que je suis la méchante, que son papa est triste à cause de moi, que j’ai cassé sa famille. C’est dur. Son père a beaucoup de mal à accepter cette séparation. La communication entre nous est très conflictuelle. Nous n’avons pas du tout les mêmes exigences sur le cadre, les horaires : l’écart est grand et c’est difficile pour elle. Le jour de la transition, en particulier…”
Pauline “Mon fils avait 15 mois quand nous nous sommes séparés. À chaque étape, on lui a expliqué ce qui se passait, mais ce n’était pas un échange : il était encore trop jeune pour cela. Aujourd’hui, il a 3 ans, et il pose beaucoup de questions : pourquoi Papa et Maman n’habitent pas ensemble ? Pourquoi Papa n’est pas l’amoureux de Maman ? Nos réponses ne doivent pas lui suffire, car il continue de poser ces questions. Par exemple, quand je lui dis qu’on se disputait trop, il me dit : “Faut pas se disputer.” Entre son papa et moi, ça se passe très bien : on a réussi à faire la différence entre l’ex et le parent, et ça, c’est le principal.”
Raphaël “Nous nous sommes séparés il y a un an, quand notre fille avait 4 ans. Ça aurait pu être conflictuel, mais la présence de l’enfant nous a obligés à prendre sur nous et à maintenir un discours d’une seule et même voix. En terme de maturité, c’est très fort. J’éprouvais une grande colère, mais j’ai tout de suite identifié son pouvoir de nuisance, et je l’ai mise de côté pour qu’elle n’impacte pas ma relation avec mon enfant. Ça n’est pas simple : il faut gérer le chagrin d’amour, le chagrin d’une certaine représentation de la vie de famille, et renouveler sa relation avec son enfant.”
Des livres pour aller plus loin
Avec les enfants
•Sur mon fil, de Séverine Vidal et Louis Thomas, Milan, 13,90 €.
•La grande aventure du Petit Tout, d’Agnès de Lestrade et Tiziana Romanin, Sarbacane, 15,50 €.
•Mon papa et ma maman se séparent, de Sophie Furlaud et Laurent Simon, Casterman, 10,90 €.
Pour les adultes
•Une semaine chez Papa, une semaine chez Maman, Comment aider votre enfant, de Claire Wiewauters et Monique Van Eyken, De Boeck, 19,95 €.
“Quand les parents se séparent”, supplément pour les parents du magazine Pomme d’Api, n° 639, mai 2019. Texte : Anne Bideault. Illustrations : Pascal Lemaître. Chiffres : (source INSEE, 2015)
Avec l’abonnement Pomme d’Api profitez d’un rendez-vous complice avec votre enfant !
Dans chaque numéro du magazine il retrouve : de magnifiques histoires pour la lecture du soir (également disponible en podcast), ses héros Petit Ours Brun, SamSam et Adélidélo et des réponses simples à ses “pourquoi-comment”.
Pomme d’Api c’est également des surprises tous les mois : des jeux rigolos pour manipuler et s’émerveiller et un cahier spécialement pour vous les parents.
Avec le magazine Pomme d’Api, c’est bon d’être un enfant !
Passage en classe supérieure votre abonnement dès 5,90€ par mois