Les p'tites pages de Margaud Liseuse - Conseils de lecture pour enfants, novembre 2020 - Pomme d'Api

“Le lion et l”oiseau” et “Un thé à l’eau de parapluie”

Margaud Liseuse et la rédaction du magazine Pomme d’Api vous conseillent deux livres pour enfant chaque mois. En novembre : “Le lion et l’oiseau” et “Un thé à l’eau de parapluie”. À découvrir en vidéo…

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Bricolage : petit chat-pot n°613 Pomme d'Api

5 idées de jeux pour faire bouger les petits

Avec un pot de yaourt, fabriquez cinq jeux différents pour lancer des défis d’agilité et de rapidité à votre enfant ! Une activité Pomme d’Api à faire à quatre mains pour bouger de la tête aux pieds !

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Pour les petits, l’intérêt c’est l’exercice de l’oreille

Pour Stéphanie Roussel, spécialiste de l’apprentissage des langues*, l’important pour les plus jeunes enfants, c’est l’entraînement de l’oreille aux autres sonorités que celles de sa langue maternelle.

C’est vrai que les Français sont nuls en langue ?

Ce qui est vrai, c’est qu’en français les syllabes sont souvent prononcées toutes avec la même force. Ce qui rend peut-être plus difficile à la fois la production et la compréhension de langues dans lesquelles la longueur ou l’accentuation des voyelles peuvent être discriminantes, comme c’est le cas en anglais, par exemple. Il y a cependant des choses bien plus difficiles à apprendre !

C’est vrai qu’en grandissant notre oreille n’est plus capable d’entendre tous les sons ?

Oui, différents travaux ont montré que notre “surdité” aux sons étrangers s’installe très tôt. L’oreille du nouveau-né est très rapidement habituée aux caractéristiques spécifiques de sa langue.

Qu’est ce qui fait que l’apprentissage d’une langue étrangère peut-être plus facile s’il est commencé tôt ?

Il y a une aisance qui est plus propice aux apprentissages des langues étrangères chez les jeunes enfants que chez les adultes. Cela dit, apprendre une L2 (seconde langue étrangère) tardivement n’est pas rédhibitoire. Les étudiants ou les adultes, motivés par un projet d’études ou professionnel, y parviennent !

L’apprentissage précoce des langues étrangères se met en place dès la fin de la maternelle en France, de manière très inégale. Selon vous quel est son intérêt ?

Dans le cadre scolaire, quand les enfants sont exposés – au mieux – une ou deux heures par semaine à l’anglais, l’objectif et l’intérêt des séances, c’est l’exercice de l’oreille à l’audition de sons étrangers, le développement de la curiosité et du plaisir des sonorités.

Quelles sont les meilleures façons d’exercer l’oreille des jeunes enfants et de leur donner le goût des sonorités ?

Les comptines, les chansons, les histoires, les jeux donnent aux enfants l’occasion de découvrir et de se familiariser avec les sonorités d’une autre langue sans qu’ils en aient forcément conscience. Ils chantent, ils jouent avec les sons. Cela peut être très utile et avoir un impact sur leur apprentissage, à condition que ces activités soient régulières et répétées.

Propos recueillis par Odile Amblard

*Stéphanie Roussel est enseignante chercheuse à l’Université de Bordeaux. Avec Daniel Gaonac’h, elle est l’auteure de L’apprentissage des langues (collection Mythes et Réalités, éditions Retz). Ce livre part des idées les plus courantes (“les Français sont nuls en langues”, “il faut commencer le plus tôt possible”, “il faut regarder des émissions en v.o”, etc) et y apporte les réponses de la recherche scientifique.

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Photo : Ines Elichondobordes

Les enfants vont associer anglais et plaisir

Pour Charlotte Thomas, professeure formatrice d’anglais*, le premier but d’une collection d’éveil à l’anglais est d’éveiller le plaisir de l’anglais chez les petits.

Hello Pomme d’Api propose une histoire, des chansons, du mime, des jeux. Cette grande variété d’activités est-elle intéressante pour les enfants ?

CT : Toutes ces activités sont intéressantes et complémentaires. Elles permettent à l’enfant d’entendre de l’anglais, de répéter de l’anglais, de jouer en anglais, de bouger avec l’anglais. C’est-à-dire de faire de l’anglais en faisant des choses qu’il aime. Il peut choisir l’activité qu’il veut, en faire une seule ou plusieurs. Il peut répéter la même histoire ou la même chanson s’il le souhaite. Tant qu’il associe anglais et plaisir, c’est gagné !

Pourquoi proposer à son enfant d’écouter des histoires en anglais ?

CT : Écouter une histoire en anglais a plusieurs intérêts. L’oreille de l’enfant s’exerce à des sonorités, un rythme et une accentuation différents. L’enfant découvre qu’avec les illustrations, il comprend très bien l’histoire même sans comprendre tous les mots. C’est stimulant et c’est bon pour la confiance en soi.

Un enfant éprouve-t-il autant de plaisir à chanter en anglais qu’en français ?

CT : Un petit enfant jubile à jouer avec les sons, avec les rythmes. Il ne se pose pas la question du sens, il est dans le plaisir de la répétition, du chant, du rythme, du ressenti. Un enfant apprend une chanson ou une comptine autant avec son corps qu’avec sa tête !

C’est l’intérêt des comptines ou des chansons à gestes ?

CT : Tout à fait ! En mimant ou en comptant sur ses doigts tout en chantant, l’enfant donne du sens aux comptines et aux chansons. C’est ainsi qu’il les comprend. Et surtout qu’il les retient le mieux : quand ça passe par son corps ! En plus, certaines comptines lui permettent aussi d’exercer sa motricité fine.

Les parents doivent-ils traduire les histoires ou les chansons en français à leur enfant ?

CT : Je ne le conseille pas car en réalité l’enfant n’a pas besoin de traduction pour comprendre le sens global et pour s’amuser. Mais si l’enfant insiste ou si le parent a envie de le faire, il peut d’abord commencer par poser quelques questions : à ton avis, qu’est ce que ça veut dire ? Et toi, qu’as-tu compris ? Il s’apercevra – et l’enfant avec lui – qu’il a saisi l’essentiel.

Qu’apportent les jeux en anglais (mime, memory, bingo) aux enfants ?

CT : Du plaisir, d’abord, et c’est très important ! Ensuite, ils donnent à l’enfant l’occasion d’associer des gestes et des mots, et de répéter à plusieurs reprises des mots ou des expressions, ce qui est la meilleure façon de mémoriser pour l’enfant.

Les parents pourront-ils mesurer les progrès de leur enfant ?

CT : Les enfants vont apprendre plein de choses qui ne seront pas toutes “mesurables”. Ils vont entraîner leur oreille à la musique de l’anglais et exercer leur appareil phonatoire (l’articulation, la prononciation, l’accentuation). Ils vont aussi associer anglais et plaisir, et gagner en aisance pour la compréhension, bref… ils vont “poser les briques” d’un apprentissage futur plus aisé et plus “fun” de l’anglais !

Propos recueillis par Odile Amblard

*Charlotte Thomas forme les professeurs formateurs d’anglais à l’INSPE de Paris (Institut national supérieur du professorat et de l’éducation). Elle a apporté son conseil à la collection Hello Pomme d’Api.

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Les petits s’imprègnent d’une langue comme d’une musique

Comment les jeunes enfants abordent-ils une langue étrangère ? Nous avons posé la question à Christelle Dodane*, spécialiste de l’acquisition du langage à l’Université de Montpellier.

Les jeunes enfants apprennent-ils une langue étrangère comme les adultes ?

Christelle Dodane : Non, cela se passe différemment bien sûr. Entre 3 et 5 ans, les enfants s’imprègnent de la langue comme d’une musique. Ils sont très sensibles à l’aspect sonore des langues et le plaisir de jouer avec les sons est très important pour eux. Ils sont dans la spontanéité d’un apprentissage qui passe par l’oral. Pour les adultes, l’apprentissage passe davantage par l’écrit et l’oral est souvent source de complexes, car autrefois l’oral, la prosodie de la langue, étaient secondaires.

La prosodie, c’est quoi ?

CD : La musique de la langue ! C’est ce qui relève de l’intonation, du rythme et de l’accentuation. L’intonation – qui est propre à chaque langue – c’est l’évolution de la hauteur de la voix. Le rythme, lui, est propre à chaque langue. Ainsi l’anglais est une langue à rythme accentuel : l’accent de mots revient régulièrement. Alors que le français a un rythme syllabique : les syllabes s’écoulent régulièrement. Quant à l’accentuation : c’est la réalisation et la localisation des accents, un élément fondamental dans l’apprentissage d’une langue. La répartition des différents accents donne le rythme.

Les musiques de la langue anglaise et française sont donc très différentes ?

CD : Tout à fait ! C’est pour cela qu’un Français a du mal à reproduire l’accentuation et le rythme de l’anglais. Surtout si on ne lui a pas expliqué, ce qui était le cas autrefois dans l’enseignement. La différence entre l’anglais et le français est grande : en anglais, l’accent tonique – l’accent de mots – revient régulièrement, alors qu’en français l’accent est le plus souvent en position finale. Dans notre langue, entre les accents, les syllabes s’écoulent de façon régulière, sans être accentuées.

Pourquoi les enfants sont-ils plus sensibles à la musique des langues ?

CD : Parce qu’ils entrent dans les langues par “imprégnation”. C’est comme cela qu’ils ont acquis leur langue maternelle ! Par imprégnation et par imitation ! Comme avec une musique instrumentale, les petits sont d’abord sensibles à globalité de la langue : le rythme, ses accentuations, les variations d’intonations… Ils sont aussi plus sensibles à la musique des langues parce qu’entre 3 et 5 ans, ils ont des capacités d’imitation impressionnantes ! Ils restituent sans difficulté la musique, mais aussi les sons, propres à chaque langue. À cet âge, et jusque vers 10 ans, leur oreille reste ouverte aux musiques des langues étrangères, ils ne sont pas encore trop influencés par la musique de leur langue maternelle.

Y a-t-il une période propice pour l’apprentissage des langues ?

CD : Oui, entre 3 et 6-7 ans, car c’est l’âge où la sensibilité musicale, et la sensibilité aux sons, sont les plus grandes. À cet âge, les enfants sont vraiment capables de jouer avec les sons, d’imiter une grande palette de sons, de s’approprier les sons d’une langue étrangère. Reproduire les subtilités rythmiques et sonores de l’anglais ne leur pose pas de problème !

On a donc tout intérêt à exposer tôt les enfants à l’anglais ?

CD : Oui, les études montrent que pour l’acquisition de la prosodie (la prononciation, l’intonation, le rythme) d’une langue, le fait d’y être exposé tôt est décisif. Cela facilitera leur apprentissage. Attention, un adulte peut aussi apprendre parfaitement une langue étrangère, mais il n’aura pas – sauf exception – la même aisance dans la restitution de la prosodie, dans la prononciation. Il aura toujours un accent “étranger”, plus ou moins important.

Nombre de parents n’osent pas chanter en anglais avec leur enfant à cause justement de leur “mauvais accent”, est-ce si grave ?

CD : Ce serait dommage que les parents s’interdisent de chanter et de jouer. Accompagner son enfant, cela le motive. C’est un plaisir partagé ! Et pour la qualité de l’accent, la collection Hello Pomme d’Api propose des enregistrements authentiques, ce qui est essentiel ! Il faut que les enfants entendent un anglais natif, authentique… ils auront plaisir à le répéter et ainsi ils enregistreront la musique de l’anglais !

Quel est l’intérêt des comptines dans l’acquisition d’une langue ?

CD : Pour les petits, les comptines jouent un rôle dans l’acquisition d’une langue étrangère comme de sa langue maternelle. Leur musique et leur rythme simple, répétitif, les rendent faciles à chanter. En les chantant, l’enfant s’amuse aussi avec des sons nouveaux, drôles. Il s’entraîne à articuler et à les reproduire (sans en être conscient).
Les comptines sont aussi très intéressantes car elles sont ludiques : l’enfant éprouve un grand plaisir à les répéter. De plus, elles sollicitent la motricité, le corps : les doigts, les mains, les pieds… Tout cela fait qu’il les mémorise avec facilité et plaisir. Grâce à elles, il apprend donc non seulement la musique de la langue, mais il entre aussi peu à peu dans les mots et le sens !

Propos recueillis par Odile Amblard

*Maître de Conférences à l’Université de Montpellier, Laboratoire de pratique linguistique, Praxiling.

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Les petits et les langues en 10 mots clés

10 mots clés pour comprendre comment les jeunes enfants s’immergent dans une langue étrangère.

1. ACTION

Un enfant n’apprend pas l’anglais : il fait de l’anglais. Il joue, il chante, il interagit en anglais. Les spécialistes parlent d’imprégnation ou d’acquisition implicite ou naturelle (les adultes ou les adolescents apprennent eux, “explicitement” une langue étrangère).

2. RELATION

La relation et les interactions avec l’adulte – notamment les parents – sont un moteur puissant. C’est grâce aux situations d’échanges, de dialogues, de jeux, que les petits apprennent et ont envie d’apprendre.

3. PLAISIR

Le plaisir est un autre moteur puissant pour tous les apprentissages. Le plaisir partagé entre l’enfant et le parent, le plaisir de jouer tout simplement, et aussi le plaisir de produire de nouveaux sons.

4. MUSIQUE

Les petits entrent dans une langue étrangère comme ils sont entrés dans leur langue maternelle : en captant son rythme, ses intonations, son accentuation, ses sons. Leur capacité à capter cette “nouvelle musique” rendra plus efficace leur apprentissage de l’oral (compréhension et prononciation) par la suite.

5. CORPS

Un enfant apprend avec tout son corps. Lorsqu’il chante en se balançant ou en dansant, lorsqu’il mime, lorsqu’il récite une comptine avec des jeux de doigts ou de mains, tous ses sens sont mobilisés. C’est ainsi que la mémorisation est la plus efficace.

6. COMPRÉHENSION

Comme pour sa langue maternelle, l’enfant n’a pas besoin de (tout) comprendre pour aimer chanter, répéter des comptines ou écouter une histoire… en anglais. Il adore chanter Frère Jacques sans savoir ce que sont les “mâtines”…? Tout comme vous aimez chanter Queen ou Ed Sheeran !

7. SENS

Les mots ne sont que l’un des ingrédients du langage et de la communication. Pour comprendre (une situation, des phrases), le petit enfant utilise le contexte et de nombreux indices, visuels ou auditifs : le décor, les gestes, les mimiques du visage, les intonations, le rythme des mots…. Il “construit du sens” avec toutes les informations à sa disposition. En découvrant une autre langue, il développe cette capacité. Et plus il la développe, plus il pourra l’appliquer à d’autres situations, ou à de nouvelles langues.

8. COMPTINES

Les comptines, les poèmes, les ritournelles, les chansons sont parfaits pour “entraîner l’oreille” à la musique d’une langue. Porté par le rythme, l’enfant reproduit naturellement l’accentuation de l’anglais, apprivoise de nouveaux sons et s’entraîne à les prononcer.

9. MÉMOIRE

C’est à force de répéter des expressions que l’enfant les mémorise. Cela devient des automatismes pour lui ! La répétition régulière et fréquente fixe la mémorisation. À l’inverse, un enfant bilingue à 3-4 ans perdra sa deuxième langue s’il ne l’entend plus du tout (mais il ne perdra pas son “oreille” et sa capacité à la parler s’il la réapprend plus tard…) .

10. VOCABULAIRE

L’acquisition du vocabulaire (les couleurs, les chiffres, les vêtements, les animaux) n’est pas le premier objectif de l’éveil à une langue étrangère. Cette acquisition se fait petit à petit, implicitement, par les interactions avec d’autres enfants ou des adultes, par les jeux (qui associent des sons et des images), et surtout par la répétition fréquente et régulière.

Odile Amblard

Sources :

Stéphanie Roussel, maître de conférences à l’université de Bordeaux, auteure notamment de Apprentissage des langues, mythes et réalités, Retz 2017.
Christelle Dodane, maître de conférences à l’université de Montpellier.
Daniel Gaonac’h, professeur émérite de l’Université de Poitiers, ancien directeur du Centre de recherches sur la cognition et l’apprentissage, auteur notamment de L’apprentissage précoce d’une langue étrangère (nombreuses rééditions).
Charlotte Thomas, professeure d’anglais et formatrice à l’INSPE (Institut national supérieur du professorat et de l’éducation) de Paris, et conseil pédagogique pour la Mallette Sing Move Play (Bayard Éducation 2019).

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